La proie

Cela faisait une semaine qu'il traquait, suivait la harde, en cette saison de nombreux faons étaient parmi elle, les femelles avaient mis bas il y a peu et il ne voulait pas tuer une mère.
La harde se serait occupée du petit mais ces dernières saisons avaient déjà été difficiles, il ne souhaitait pas leur faire courir un risque de plus.
Il ne s'en prendrait pas non plus à la femelle dominante, elle connaissait l'emplacement des points d'eau, sa perte pourrait être fatale au groupe.

Il connaissait toutes ces hardes, les suivait régulièrement chaque année sur de longues distances, passant très souvent la frontière entre l'Aquilonie et la Cimmérie.
Sa proie était à présent fixée dans son esprit, il avait repéré une biche sans faon, cette année elle n'avait pas participé au rut, sa mort ne mettrait pas en péril la harde.

Elles s'étaient arrêtées à un point d'eau, la femelle dominante boirait la dernière, pour le moment elle s'assurait que tout allait bien.

Il entendit les bruits en même temps qu'elle, c'était une troupe de chevaux et d'hommes en arme, le cliquetis répétitif du métal indiquait le port d'épées et d'armures avec du métal.

La harde se dispersa dans les bois rapidement, mais ce n'était plus grave, son attention était fixée ailleurs... une odeur l'avait envahit, non pas l'odeur des chevaux ou du musc des guerriers, mais une odeur sucrée, une odeur fruitée.
Une odeur de femme !

Cela faisait bien longtemps qu'il ne s'était pas couché sur une femme, sa proie pourrait attendre, il en avait une autre en tête.

La troupe était constituée d'une douzaine d'hommes en arme, ils portaient des piques pour la plupart, une épée courte au coté.
Certains, et c'était ceux-là qui le gênait le plus, portaient un arc court, tous avaient la même armure, du cuir clouté, et tous portaient le même symbole.
Ils escortaient un chariot tiré par trois chevaux et entièrement bâché, c'était de lui que venait l'odeur envoutante.
Ce que faisait cette troupe ici, d'où ils venaient, où ils allaient ne l'intéressait pas, seule cette odeur lui importait.

Il accéléra le pas, car plus haut sur la route il aurait un endroit plus avantageux pour attaquer, la route passait à coté d'un haut rocher.
Il s'y installa et se prépara, appelant à lui les forces de la nature, invoquant à l'ours de lui prêter sa force, demandant aux pierres de renforcer sa peau, il ajusta les liens de son armure annelée et pris fermement la hampe de son marteau à deux mains.

La troupe approchait...

Une fois la tête du groupe et le chariot passé il prit une profonde inspiration, se concentra et utilisant les force de la nature, amplifia son rythme cardiaque.

Sa première victime ne sut jamais comment elle mourut, la colonne vertébrale réduite en miette par la puissance du choc.
Sa stratégie avait été des plus simple, tomber au cœur des quatre gardes qui fermaient le convoi et les écraser.
Il devait être des soldats d'expérience car ils réagirent aussitôt, il senti la morsure d'une pique sur sa jambe et une vive douleur à l'épaule.
Il pris appui sur sa jambe intacte et fit une violente rotation, la douleur lui vrillait l'épaule mais ses mains tenaient fermement son marteau.
Le premier choc fut mineur, son marteau ne fit qu'arracher le nez et le visage du premier garde, mais le second fut éprouvant pour ses muscles.
Son marteau s'était enfoncé dans les côtes du troisième homme, les broyant net sous la force du choc.
Cette fois si une douleur bien plus grande l'envahit, le dernier garde avait profité de l'ouverture dans son flan droit pour y enfoncer sa pique et atteindre les organes internes.
Un flot de sang remplit sa bouche et il le cracha en même temps que son marteau écrasa l'épaule du quatrième.

Son souffle était court mais quatre adversaires gisait au sol, il ne faisais pas attention aux cris en provenance du chariot ni aux ordres qu'il entendait mais ne comprenait pas, il focalisait son attention sur ses blessures qui commençaient à se résorber.
La puissance de la nature coulait en lui, son clan l'avait reconnu comme soigneur depuis son enfance, et cette même puissance lui permettait en ce moment même d'être encore debout.

Deux chocs sourds le sortirent de sa concentration, une flèche s'était plantée dans son épaule et une autre dans sa cuisse, les autres membres de la troupe étaient en position.
Un groupe de huit soldats l'attendait, quatre archers le pointait de leurs flèches.
Malgré leur supériorité numérique ils pouvaient sentir la peur sur les visages des guerriers.
Ces aquiloniens étaient pire que des femmes, les femmes cimmériennes n'auraient fait qu'une bouchée de lui.
L'odeur de sang, le parfum de la femme l'envoutait, mais il remarqua un homme dans le lot qui montrait un désir proche du sien, une envie d'en découdre.
Il brayait à son attention ou à celle de ses hommes, mais cela ne l'intéressait pas.

Son choix était fait, il se rua sur lui !

Sa vitesse ou la peur qu'il avait créée chez ses ennemis eut raison de leur concentration, les deux archers décochèrent leurs flèches mais elles ne touchèrent aucun organe vital. Son bras et son rein furent ainsi perforé, il serra les dents mais cela ne l'arrêta pas.
Son attention fixée sur le chef de la troupe, il tenta d'un ample mouvement de l'écraser sous son marteau.
Il ne frappa que le sol, son adversaire avait connu beaucoup de combats, cette attaque n'avait aucune chance de le toucher, au contraire elle lui offrait une cible magnifique et une chance de combat rapide.

Il enfonça son épée dans la poitrine de son ennemi en direction du cœur, il aurait dû l'atteindre si celui-ci n'était pas sous la protection de la nature.
Son épée ne parvint qu'à déchirer sa chair sans pénétrer au plus profond, mais arracha avec elle un cri de douleur du cimmérien.
La douleur commençait à engourdir ces muscles, son formidable marteau s'alourdissait en même temps que son sang s'échappait de ses blessures.

Les archers lâchèrent leurs arcs pour sortir leurs épées courtes, les soldats tentèrent en même temps de le frapper.
Toute cette belle organisation était inefficace face à un homme seul en son sein.
Toutes leurs stratégies, leurs sciences acquises dans les académies ne les avait pas préparé à la barbarie, ils avaient l'habitude d'une mélée rangé.
Lui n'avait qu'à frapper...

Un mouvement circulaire de son marteau emporta la vie de deux soldats, il visait pourtant leur chef mais celui-ci avait évité encore une fois l'attaque.
Le premier gisait la jambe arrachée, le second avait eu le bassin broyé par la puissance du choc.
Au passage quelques plaies suplémentaires s'étaient ouvertes sur son épaule et ses côtes.
Les soldats ne le voyaient plus comme un homme, son armure était maintenant maculée de sang, son marteau, la hampe et ses bras semblaient ne faire qu'un.
Lui, tentait de toucher son adversaire direct, mais il était meilleur que ses précédentes cibles, les mouvement ample ne le toucheront pas même s'il faisait mouche sur les autres gardes.

Il ne resta rapidement qu'eux deux.
Le soldat aquilonien était aussi maculé de sang que son adversaire, l'un était recouvert de son propre sang et de celui de ces victimes, l'autre était couvert de ses compagnons tomber sous la masse du barbare.
L'aquilonien montrait une science parfaite du combat, sa posture était sans défaut, ses muscles fait pour le combat étaient vifs et précis dans les attaques et les défenses.
L'autre vouté en avant, les bras pendant le long d'un corps couvert de blessures suintant abondamment du sang, à bout de souffle, tenant fermement un marteau de guerre.
Sa force l'avait lentement quitté et bien que sa magie coulant en lui le maintenait encore debout, son arme était trop lourde, trop lente pour son adversaire.

Ils se regardaient, se jaugeaient, le cimmérien leva sa masse à deux mains comme s'il comptait enfoncer l'aquilonien dans le sol.
Il n'en fallait pas plus au guerrier aquilonien pour attaquer dans le flanc complètement ouvert de son ennemi, en enfonçant son épée jusqu'à la garde dans son ventre.
Le cimmérien vomit un flot de sang, lâcha son puissant marteau dans son dos et sentit ses jambes flancher.
Son regard devint vitreux avant que sa tête s'incline brutalement en avant...

L'aquilonien jubilait, il venait d'achever celui qui avait tué onze de ses hommes, il rentrerait couvert de gloire et aurait une histoire à raconter à la taverne.
Il pourrai décrire son combat avec de sanglant détaille qui feront brailler les hommes et frémir les filles de joie, elles auraient tôt fait de le réconforté de leur bras...

Il allait retirer son épée du ventre de son adversaire pour le laisser tomber à terre, mais alors qu'il tira, brusquement, les mains pleine d'une force nouvelle de son adversaire se posèrent sur les siennes et les broyères sur la garde.

Dans le regard du cimmérien ne se trouvait pas la mort, mais la puissance de l'ours et le désir de tuer. D'un mouvement de nuque sec et rapide, il cassa de son front le nez de l'aquilonien qui tomba à terre.
Tombant à genou, il retira ensuite la lame aquilonienne de son corps puis transperça de part en part le soldat au sol, le clouant comme un insecte rampant.

*ahem*

Uman, qui passait par la, avait tout suivit de ce fabuleux combat. Il ne cessait de se dire *putain comment c'est cheaté le chaman!!* qu'un tel combattant ferait un parfait mercenaire.

Lentement il reprenait ces forces, il ne les retrouverait pas totalement avant plusieurs semaines, mais ce qui l'attendait maintenant ne lui demanderait pas autant d'effort.
Son armure était en lambeaux et ce combat lui vaudrait encore d'autres cicatrices, mais cela n'importait pas, seul le souvenir de l'odeur qui l'avait fait venir ici comptait.
L'odeur du sang l'avait recouverte, l'odeur de son sang, du sang des aquiloniens gisant maintenant à ses pieds. Cette odeur ne le gênait pas mais elle l'empêchait de sentir l'odeur de sa proie.

Il laissa tomber ce qu'il lui restait de son armure, retira ses chausses, ne gardant que son pagne.
Son torse nu et massif comportait une multitude de cicatrices et de plaies ouvertes, la plus grave de toutes laissait encore un léger filet de sang couler, quand aux autres, elles commençaient déjà à se refermer progressivement.

L'attention qu'il portait à canaliser les flux magiques naturels pour se guérir fut interrompue par un son doux et mélodieux sortant du chariot.
Il ne comprenait pas ce qu'elle disait, mais cette voix lui évoquait le cours d'un ruisseau, la douceur de l'eau quand il se baignait dedans après une longue journée de chasse... 

Son désir enfla et cette mélodie, lui rappela ce qu'il était venu prendre à cette troupe, il parti donc vers le chariot qu'une bâche de tissu recouvrait.
D'un geste brusque il écarta le tissu, ce qui provoqua un petit cri de peur de la femme qui se trouvait à l'intérieur.

Elle ne devait pas avoir plus de 20 ans, avec de grands yeux vert et des cheveux noir long et soyeux qui tombaient sur ses épaules.
Sa peau blanche ne devait pas avoir dû subir beaucoup les rayons du soleil, et il voyait par son grain parfait qu'elle avait dû connaître une existence pour le moins paisible.
Elle portait une jolie tenue verte et bleu, son haut laissant entrevoir une poitrine naissante et ferme, et sa robe des mollets fins et délicats.
La proie qu'il était venu prendre était l'incarnation de la beauté aquilonienne...

Pourtant il laissa tomber le rideau et parti.
Il parti car en ouvrant le rideau, deux choses plus marquantes avaient attiré son attention : tout d'abord il le sentait maintenant, l'odeur du capitaine emplissait cette pièce, une odeur de musc, de transpiration...
Mais cela n'était pas grave, il ne s'attendait pas à être le premier.
Non, ce qui le fit partir fut le regard qu'elle posa sur lui, il s'attendait à un peu de peur, voire de l'étonnement... les cris de ses gardes avaient dû l'alerter du danger, le râle de son capitaine que son ennemie avait vaincu... mais en entrant il vit qu'elle le regardait avec envie...